Vents sur la côte Ouest - Une famille est séparée

Par Sherri

Mon conjoint, nos trois enfants et moi-même vivions sur la côte ouest de la Colombie-Britannique. La journée de l'ouragan a débuté comme toutes les autres. Nous nous étions levés à 6 heures avec les enfants, avions préparé les casse-croûte de midi et écouté les informations et la météo. Mon époux est parti pour aller travailler sur son chantier de construction, dans le nord de la ville, à une heure et demie de route de chez nous. Mes plus jeunes ont pris leur autocar scolaire pour un trajet de 10 minutes. L'aîné, qui va au secondaire, doit faire un trajet plus long de 40 minutes. Moi, je travaille à la maison où j'ai un bureau. Je réponds au téléphone et je tape à l'ordinateur.

Nous étions en novembre 2006 et la météorologie avait annoncé des vents en rafales. Je n'aime pas vraiment le vent parce que nous sommes entourés de forêts. Quand le vent a commencé à forcir, j'ai éteint mon ordinateur et essayé de contacter mon conjoint au téléphone. Le service cellulaire dans les endroits éloignés de la ville n'est pas très bon. Je lui ai donc laissé un message pour lui dire que le vent soufflait à 80-90 km/h. À peine avais-je raccroché que j'ai entendu le bruit d'un arbre en train de se fendre en deux. Au moment où je jetais un coup d'œil par la fenêtre, je l'ai vu s'abattre, ratant de peu la ligne électrique et notre maison locative située tout à côté de la nôtre. Le courant a commencé à fluctuer, ce qui était annonciateur d'une coupure. Le vent soufflait maintenant à plus de 100 km/h et je suis sortie pour aller fermer les volets. J'ai tout arrimé dans le jardin et suis restée dans l'allée, assourdie par les bruits de la forêt malmenée par le vent. J'ai eu un coup au cœur quand j'ai entendu un autre arbre exploser. Les pruches et les sapins géants se balançaient comme des brindilles au-dessus de la maison.

Quand l'autocar scolaire a déposé mes plus jeunes, j'ai couru pour aller les accueillir et, sur le chemin du retour, j'ai fait très attention de ne pas nous exposer à la chute éventuelle de fils électriques qui sautaient et se balançaient dans tous les sens sous le martèlement des branches. Alors que nous arrivions à la maison, un autre arbre s'est abattu. Comme les enfants avaient peur, je les ai fait monter dans le VUS que j'ai garé en plein milieu de la cour, là où aucun arbre ne risquait de s'abattre sur nous. Le temps allait en s'assombrissant. Mon fils aîné n'était pas rentré de l'école et mon conjoint était coincé au travail. Les lignes téléphoniques étaient coupées, il n'y avait plus de courant et les enfants et moi avions l'impression d'être au cœur de l'ouragan. Puis, un énorme pin s'est couché en travers de la route. Nous ne pouvions plus sortir.

J'ai coupé le moteur, mais j'ai laissé la radio pour distraire les enfants; je leur ai remis un livre à chacun avant de revenir dans la maison pour prendre mon vieux téléphone. Je dois préciser que je conserve toujours un de ces vieux téléphones cellulaires qui fonctionnent dans les régions rurales. J'ai pu appeler l'école et parler à mon fils qui m'a dit qu'il était bloqué, qu'il n'était arrivé à communiquer avec aucun de nous et qu'il ne savait pas que faire. Je lui ai dit de ne pas bouger en attendant que je trouve un moyen de le faire revenir à la maison. J'ai pu parler à mon époux. Il m'a annoncé que tellement d'arbres étaient tombés que la compagnie d'électricité avait estimé qu'il faudrait au moins trois jours de travail pour dégager les routes. J'ai appelé un ami en ville qui m'a garanti qu'il irait récupérer mon fils et qu'il l'accueillerait chez lui. Il est parvenu à le faire venir au bout de la route et, à partir de là, des voisins ont pu le faire passer par le boisé, loin des lignes électriques jusqu'à un lieu sûr, ce dont j'étais reconnaissante. Mon mari, lui, est finalement parvenu à rentrer à la maison après avoir dégagé la route avec deux équipes, dont la sienne.

Nous étions prêts à faire face à ce genre de situation, parce que nous avions un groupe électrogène, des bougies, des lampes de poche, un poêle à bois, le nécessaire de camping, de l'eau potable, de l'eau courante, des piles, une réserve d'essence et deux congélateurs remplis de nourriture. Nous avons mis des couvertures à l'intérieur des congélateurs pour combler l'espace vide, ce qui donne de meilleurs résultats que d'envelopper le congélateur. Nous les avons branchés au groupe électrogène, avons placé le contenu du réfrigérateur dans des glacières pleines de glaçons, utilisé le poêle à bois pour faire la cuisine et vécu à la lumière d'une lanterne et de bougies. Nous sommes restés cinq jours sans courant. Nous n'avons pas paniqué, parce que nous avions tout l'équipement d'urgence dont nous avions besoin. La vitesse du vent a officiellement atteint 115 km/h. Plus tard, en novembre et décembre, puis en janvier 2007, d'autres tempêtes de vent ont occasionné des ravages, notamment à cause d'une série de micro-rafales (vents violents). À deux coins de rue de notre maison, nous pouvions voir les traces laissées par le passage de mini-tornades. Heureusement, personne dans le voisinage n'a été blessé, mais les dégâts ont été conséquents. Nous sommes les témoins d'un changement climatique et nous devrons nous y préparer.

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